La fin de la série culte Les Soprano est ratée : c’est l’avis de Lorraine Bracco, qui joue le rôle de la psy de Tony Soprano.
Il n’y a pas que des mauvaises fins de séries (Game of Thrones, Dexter, 24 heures chrono), et des exemples de réussite à peu près unanime (Breaking Bad, Mr. Robot, Mad Men). Il y a aussi des cas plus délicats, avec des derniers épisodes qui alimentent toujours d’interminables débats, des années après. Au hasard : Lost, Battlestar Galactica, ou encore Code Quantum.
Pour certaines personnes, la fin des Soprano fait partie de ces rendez-vous un peu manqués. Dans les ultimes instants du dernier épisode diffusé en 2007, le créateur de la série culte David Chase a décidé de laisser planer un doute, avec un effet de montage abrupt (le son d’une porte qui s’ouvre, un cut, un écran noir) lourd de sens.
Ce choix fort a déplu à pas mal de gens, mécontents d’être condamnés à ne pas savoir ce qu’il adviendra de Tony Soprano et son clan. Et l’actrice Lorraine Bracco, qui incarne la psy du mafieux dans la série, est toujours d’accord pour dire que c’est une fin très ratée.
ATTENTION SPOILERS SUR LES SOPRANO !
« JE PENSE QUE C’ÉTAIT MAUVAIS, ET UNE ERREUR »
Après 6 saisons et 86 épisodes, Les Soprano a fait ses adieux en 2007 avec l’épisode Fabriqué en Amérique (Made in America), écrit et réalisé par le créateur de la série, David Chase.
Dans la dernière scène, Tony est avec sa famille au restaurant. Le temps est étiré à l’extrême sur des moments a priori anodins, et la caméra insiste sur un homme qui attend au bar en jetant des coups d’œil sur les Soprano, avant d’aller aux toilettes à côté d’eux. Alors que Meadow a ENFIN réussi son créneau et se dirige vers le restaurant, la porte s’ouvre et Tony lève les yeux vers… FIN.
Ainsi s’achève Les Soprano : avec le doute sur le destin des personnages, peut-être morts, ou peut-être condamnés à vivre avec la possibilité de passer l’arme à gauche à chaque instant, dans les endroits les plus ordinaires.
Et c’est ça qui a déplu à Lorraine Bracco, laquelle a reparlé de la fin de la série chez The Spotlight With Jessica Shaw en septembre 2024 :
« Je n’étais pas contente de la manière dont David a conclu ça. Je pense que c’était mauvais, et une erreur. J’étais agacée. Je lui ai dit, ‘Comment tu peux investir cinq ans dans la vie de quelqu’un, et juste partir comme ça ?’. Je lui ai dit, ‘C’est pas cool’. »
NE PAS LE VOIR POUR LE CROIRE
Depuis la fin des Soprano en 2007, ce choix a soulevé de vifs débats. David Chase en a souvent reparlé, expliquant qu’il ne s’attendait pas à de telles réactions.
Il racontait aussi à The Hollywood Reporter en 2021 qu’il n’avait aucune envie de montrer la mort de Tony Soprano, même si c’était le désir d’une partie du public :
« Ce qui m’a embêté, c’est le nombre de gens qui voulaient VOIR Tony tué. Ça m’a gêné ça. […] Et je me suis dit : « Mon dieu, vous avez regardé ce mec pendant sept ans, et je sais que c’est un criminel. Mais ne me dites pas que vous ne l’aimez pas d’une manière ou d’une autre, ne me dites pas que vous n‘êtes pas de son côté d’une manière ou d’une autre ». »
Pour lui, l’idée au centre de cette scène finale était simplement de continuer à croire. Et ça tombe bien puisque Lorraine Bracco a décidé de croire que Tony a survécu, et qu’il a retrouvé Jennifer Melfi par la suite. Elle n’a jamais posé la question à David Chase, mais a toujours imaginé qu’il était en vie. Elle l’a redit une nouvelle fois chez The Spotlight With Jessica Shaw en septembre 2024 :
“Honnêtement, je pense qu’ils sont tombés l’un sur l’autre dans des restaurants ou ce genre de choses. Je pense qu’une partie de moi veut croire qu’elle a pris un moment pour s’éloigner de lui, et qu’ils sont revenus l’un vers l’autre, en thérapie. Je pourrais croire ça. »
Dans tous les cas, l’histoire a continué au cinéma avec le prequel Many Saints of Newark, où Michael Gandolfini (le films de James Gandolfini) incarne un jeune Tony Soprano. Sorti en 2021 (dans un contexte de Covid, et en simultané sur HBO Max), le film réalisé par Alan Taylor a été un énorme bide, avec environ 13 millions récoltés au box-office pour un budget de 50 millions.
Pour moi c’est vraiment une fin parfaite. On a suivi ces personnages pendant un laps de temps, et on arrête simplement de les suivre au moment où la caméra se coupe et où l’écran noir apparait.
Peut-être que Tony se fait fumer, peut-être pas, ce n’est pas l’important. La vie continue pour les autres personnages et pour nous, mais on a partagé un bout de chemin avec eux.
J’ai vu la série 7 ou 8 fois intégralement et j’ai à chaque fois une interprétation différente de la fin. Généralement mon interprétation est que Tony continue à vivre après cette scène, mais j’accepte aussi le point de vue inverse et les indices qui penchent dans ce sens (la théorie de la veste, les trois points de vue, etc). La logique voudrait qu’il meurt, mais j’aime bien me dire qu’il poursuit juste son chemin sans moi, sans le spectateur que j’ai été. Ou pas, mais ça ne compte pas, car on n’est plus là pour le savoir.
Sûrement la meilleure série jamais produite (avec The Wire)… et merci Batmalien pour cette analyse de la fin, fin que j’avais beaucoup appréciée à l’époque… même si forcément, c’est toujours frustrant de devoir dire adieu à son personnage de fiction TV préféré.
En revanche, je n’ai jamais compris ce qui est passé par la tête de Chase lorsqu’il a écrit Manu Saints… un long et profond ennui m’a parcouru en le voyant. Je m’attendais à ce que le créateur des Soprano embrasse cet autre médium qu’est le cinéma… mais non, il a simplement réussi à bâcler le plus long et mauvais épisode spin-off de l’une des grandes séries au monde. Dommage
Heureusement que Bracco n’est pas scénariste, chacun son job. La fin est parfaite car mystérieuse, sujette à moultes interprétations, et surtout elle crée la surprise car bcp s’attendaient à une mise à mort violente et explicite. Le fusil d’assaut M4 reçu dans les derniers épisodes par Tony est une fausse piste laissée par Chase pour exciter l’imaginaire du spectateur qui s’attendait à une fin en gunfight nerveux à la Scarface.
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Revoyez la mise en scène finale géniale qui alterne trois points de vue : un plan sur la porte du resto qui s’ouvre en frappant la petite cloche, un plan sur Tony attablé, un plan en vue subjective « dans les yeux de Tony », puis de nouveau un plan sur la porte du resto qui s’ouvre et ainsi de suite. L’écran noir final + le son coupé en même temps sont clairement synonyme de mort (on est sensé être dans le plan en vue subjective à ce moment, Tony voit « noir » parce qu’il est inconscient/mort).
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Sans parler du client louche qui va aux WC probablement chercher une arme (référence à The Godfather), le fait que Tony subit deux tentatives d’assassinat au cours de la série (on dit « jamais deux dans sans trois ») et en parallèle sa fille à l’extérieur de resto qui galère à faire un créneau (je compatis) rate 2x et réussi du 3ème coup, et d’autres trucs que j’ai plus en tête mais la scène finale contient pleins d’éléments symboliques.